Page 12 - Lettre d'information n°33
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de bleu comme à l’orphelinat » . L’uniforme structures similaires à vocation correctionnelle,
suggère la vie en commun, l’internat et son iné- auxquelles l’État confie longtemps l’encadre-
vitable règlement intérieur. ment des enfants délinquants, font l’objet
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Ces quelques détails annoncent peut-être d’écrits historiques approfondis .
l’image plus sombre que les orphelinats véhicu-
leront au siècle suivant, associés bien souvent à
une vocation correctionnelle ou à un système
d’éducation archaïque. Deux œuvres récentes,
dont l’histoire se déroule dans les derniers
temps des orphelinats, apportent ainsi une vi-
sion très critique de cette institution . Ces diffé-
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rents extraits, tirés de nos lectures scolaires ou
d’enfance, laissent présager un univers entier et
singulier, mais les résultats d’une recherche lit-
téraire plus approfondie s’avèreront en définitive
bien minces.
2.2 « Méconnus des historiens »
L’historiographie des orphelinats, essentielle-
ment alimentée par des hagiographies de fonda-
teurs ou de brèves notices historiques locales,
manque longtemps de consistance. L’institution
ne bénéficie que de sources imprimées assez
limitées : les réflexions des partisans d’orpheli-
nats agricoles engendrent ainsi un foisonne-
ment de bulletins, tous circonscrits à cette seule
éventualité ; de même, les rapports annuels des
orphelinats protestants, très précieux, gardent
un côté systématique et répétitif.
Dans les ouvrages relatifs à l’assistance
publique ou à la charité privée, les orphelinats
occupent une place mineure. Depuis le
XIXe siècle, les historiens de l’enfance assistée, Au milieu du XXe siècle, la transformation défi-
penchés sur la construction de ce service public, nitive des orphelinats, ainsi que leur adaptation
n’abordent pas le sujet des orphelinats, ou bien aux exigences sociales d’après-guerre, expri-
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de manière très accessoire . Il faut néanmoins ment toute la désuétude de cette œuvre chari-
préciser que les auteurs contemporains, même table. Les orphelinats retombent alors, jusqu’à
s’ils se cantonnent à l’assistance publique, con- une époque récente, dans l’oubli scientifique, ne
sacrent plus d’espace aux œuvres privées . persistant que dans l’imaginaire populaire. Ces
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Certes, les recherches sur la bienfaisance pri- dernières années, plusieurs travaux de grande
vée réservent de larges passages à ces établis- valeur se sont néanmoins intéressés à ces insti-
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sements . L’œuvre des orphelinats ne connaît tutions, tout en restant focalisés sur une œuvre
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cependant pas d’études globales alors que des en particulier .
26 A. DAUDET, Quarante ans de Paris (1857-1897), La Palatine, Genève, 1945, p. 85.
27 Ph. LUDGER, Je foutrai le feu à l’orphelinat, Atlantic, Paris, 1987 et R. d’HUMILLY, Mes enfants de l’orphelinat, Le Cercle
d’or, Les Sables-d’Olonne, 1988.
28 L. LALLEMAND, Histoire des enfants abandonnés et délaissés : études sur la protection de l’enfance aux diverses époques de la
civilisation, A. Picard, Paris, 1885, pp. 343 à 345 (trois pages sur près de huit cent).
29 D. LAPLAIGE, Op. cit. ; I. JABLONKA, Op. cit.
30 S. DHONT, Op. cit., pp. 353 à 365 ; O. VERNIER, D’espoir et d’espérance. L’assistance privée dans les Alpes-Maritimes au
XIXème siècle (1814-1914). Bienfaisance et entraide sociale, Éditions Serre, Nice, 1993, pp. 162 à 178.
31 H. GAILLAC, Les maisons de correction (1830-1945), Éditions Cujas, Paris, 1971 ; M. ROUANET, Les enfants du bagne,
Éditions Payot, Paris, 1992.
32 M. GARDET & A. VILBROD, Les orphelins-apprentis d’Auteuil. Histoire d’une œuvre, Belin, Paris, 2000 ; C. GAUDRIE,
De la colonie agricole de Gaston de Montjous à l’institution Saint-François-Xavier Don Bosco (1857-1960) : étude de la population scolaire
et du fonctionnement d’un orphelinat catholique en Gironde, Thèse d’histoire sous la direction de Marc Agostino, Bordeaux, 1993
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