Page 14 - Lettre d'information n°33
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CONCLUSION
Durant les « Trente glorieuses », les pouvoirs l’action caritative et à la professionnalisation du
publics procèdent à une refonte complète de personnel, les congréganistes créent des asso-
l’assistance à l’enfance. L’instauration de la ciations qui se voient confier l’animation et la
Sécurité sociale par les ordonnances d’octobre gestion des orphelinats, assurant ainsi la conti-
1945, ouvre une ère nouvelle dans laquelle l’État nuité de ces œuvres. Il faut faire une distinction
accompagne le développement des institutions entre les institutions à caractère sanitaire et les
sanitaires et sociales, qu’elles soient publiques institutions à caractère social.
et privées. Cette interaction entre la charité Parmi les premières, les internats médico-
privée et l’assistance publique donne naissance éducatifs accueillent des enfants et des adoles-
au secteur de l’éducation spécialisée, qui se pro- cents atteints de déficiences intellectuelles, afin
pose d’aider les enfants inadaptés au système de leur donner des soins et une éducation spé-
classique de l’Éducation nationale. Les orpheli- ciale. Les instituts médico-pédagogiques
nats modifient leur action en l’orientant vers des (I.M.P.) prennent en charge les enfants de trois
populations ayant des difficultés sociales ou à quatorze ans. Les instituts médico-profession-
éducatives. Cette politique de modernisation nels (I.M.Pro) s’occupent ensuite des jeunes de
comprend la mise aux normes des locaux et le quatorze et vingt ans, pour leur donner un ensei-
recrutement d’un personnel qualifié, afin de gnement professionnel adapté. Dans un objectif
répondre aux exigences de l’État. d’efficacité, la circulaire du 20 juillet 1970 préco-
La mutation des orphelinats s’opère dans les nise le rassemblement des I.M.P. et des I.M.Pro,
années cinquante. Les démarches préfectorales au sein d’instituts médico-éducatifs (I.M.E.)
sont à l’origine du processus de transformation. uniques. À Lavaur, les Filles de Jésus quittent
Depuis l’apaisement des tensions religieuses, l’établissement Saint-Joseph vers 1950 pour
les conseils généraux ont rétabli des subven- s’installer route de Toulouse, actuelle avenue
tions pour les établissements congréganistes et Charles de Gaulle. Elles y ouvrent en 1953 un
leurs œuvres. Alors que l’État souhaite orienter centre médico-éducatif, appelé Notre-Dame de
l’initiative privée charitable, ce financement l’Espérance.
public permet aux préfets d’exiger une adapta- L’action des secondes se renforce avec deux
tion des orphelinats à la nouvelle politique textes relatifs à l’enfance en danger : l’ordon-
sociale. L’incorporation à l’action publique con- nance du 5 janvier 1959 sur sa protection judi-
serve, malgré la pression préfectorale, une ciaire et le décret du 7 janvier 1959 sur sa
logique contractuelle. En contrepartie de la sur- protection sociale. Les maisons d’enfants à
veillance publique, les œuvres privées peuvent caractère social (M.E.C.S.) sont des établisse-
désormais espérer un subventionnement du- ments recevant des enfants sains physiquement
rable et régulier. et mentalement, placés pour des raisons fami-
liales. Placées sous la compétence des conseils
Le monde religieux dépasse sa crainte, pre- généraux, elles sont financées par eux, dans le
mière, d’abandonner cette liberté qui le définit, cadre d’une habilitation, sous la forme d’un prix
pour adhérer à la nouvelle orientation sociale. de journée. La convention d’agrément de la
Une telle décision ressemble davantage à un Direction Départementale des Affaires Sani-
ralliement qu’à une initiative, mais prouve en taires et Sociales (D.D.A.S.S.) marque la trans-
définitive la faculté d’adaptation de cette œuvre formation de l’orphelinat en M.E.C.S. au titre de
particulière. Les animateurs des orphelinats an- la protection de l’enfance.
ticipent un changement général, qui va affecter
les populations traditionnelles de ces institu-
tions. Le personnel hospitalisé, composé essen-
tiellement d’enfants « en danger », diminue pro-
gressivement en raison des progrès de
l’assistance publique. Le personnel hospitalier,
congréganiste, rencontre un problème croissant
de recrutement, qui s’amplifiera avec la crise
des vocations dans les années soixante. Alors
que les entrées en religion se raréfient et que la
moyenne d’âge augmente, il devient compliqué
de recruter des religieuses. Par ailleurs, l’évolu-
tion médico-sociale des établissements attire un
personnel laïque, de plus en plus nombreux, qui
réclame un statut et des salaires. Par consé- Le grand réfectoire de l'orphelinat Saint-Jean
quent, pour s’adapter à la sécularisation de
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