Page 3 - Lettre d'information n°32
P. 3
qu’il se présente l’occasion de le faire et infirmes et fournir du travail aux pauvres valides
défenses de leur fournir aucune subsistance qui n’auraient pu s’en procurer. » Le préambule
lorsqu’il y aura des ouvrages sur les lieux aux- de la constitution du 24 juin 1793 édicte en son
quels ils pourront gagner suffisamment pour article 21 que « les secours publics sont une
avoir de quoi vivre. » L’arrêt reconnaît toutefois dette sacrée ». La Révolution française affirme
la nécessité de secourir ceux qui ont besoin donc de nouveaux concepts et une nouvelle ap-
d’assistance à cause de leur âge, de leurs infir- proche de la gouvernance du social, mais ses
mités ou du trop grand nombre d’enfants dont ils objectifs restent inapplicables malgré les efforts
sont chargés. Turgot crée en 1782 un Inspecteur du Comité de mendicité, puis du Comité des
général des hôpitaux. En 1784, Necker, dans secours publics. Comme l’écrit Henri Hatzfeld,
son Traité de l’administration des finances, « Supposer que du centre de la Nation pour-
évoque les hôpitaux et dépôts de mendicité qui raient être réparties sur tout le territoire les
accueillent plus de 100 000 malheureux, dont sommes nécessaires à la vie des hôpitaux et
25 000 malades, 40 000 enfants trouvés, 40 000 plus généralement à l’existence des citoyens
infirmes et pauvres. hors d’état de travailler relevait évidemment de
la plus généreuse des utopies en 1793 et dans
1
La Révolution française commence par mettre à les années qui suivront . »
bas une partie des institutions existantes. La loi
Le Chapelier du 14 juin 1791, au nom de l’intérêt Les termes du débat sur la protection sociale
général, supprime les corps intermédiaires entre n’en sont pas moins posés : de quel type d’orga-
l’État et le citoyen, notamment les associations nisation doit relever la protection sociale ?
artisanales ou ouvrières, qu’elles soient sous Obligation collective ou prévoyance indivi-
forme corporative ou mutualiste. L’Église est pri- duelle ? Corporatisme ou mutualité, libéralisme
vée de ses biens qui lui permettaient de mener et charité ou intervention de l’État concentrée ou
une action charitable. C’est à la Nation de fournir décentralisée ?
des travaux à ceux qui en ont besoin pour leur
existence et des secours aux infirmes. La cons- Cette conférence se limitera à la mise en place,
titution du 3 septembre 1791 prévoit dans son à partir du XIX siècle, des premiers systèmes
e
er
titre I qu’« il sera créé et organisé un établis- obligatoires de protection sociale en distinguant
sement général de secours public, pour élever deux grandes périodes jusqu’en 1940, avant et
les enfants abandonnés, soulager les pauvres après les assurances sociales de 1928-1930.
Arrêt de la Cour du Parlement pour la subsistance des pauvres du 30 décembre 1740 (source gallica.bnf.fr/BnF).
1 HATZFELD Henri, Du paupérisme à la Sécurité sociale 1850-1940. Essai sur les origines de la Sécurité sociale en France, Paris,
Librairie Armand Colin, 1971, réédition Presses universitaires de Nancy, 2004.
3