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n° 28
Juin 2021
Les ambiguïtés du Caducée
Première partie
« Comment comprendre l’antinomie française d’une médecine à
l’acte, individuelle investie d’une mission de santé publique ?
Dans quelles conditions s’est effectué ce transfert, que nous dit-
il des relations entre État, santé publique et médecins ? ».
Telle est la thématique étudiée par Albert Anouilh dans la période
située entre la création par Turgot en 1776 de la Société royale
de Médecine, et l’adoption en 1892 de la loi sur l’exercice de la
médecine.
Le volume de cette étude nécessite sa publication dans deux
numéros de cette Lettre. Cette première partie va de la fin de
l’Ancien Régime, à la période hygiéniste sous la Restauration en
passant par les soubresauts de la Révolution avant le Premier
Empire. La fin de l’ancien régime étonne par la richesse de la
réflexion à la suite de l’Encyclopédie, la découverte du concept de population et d’outils de
gestion pour l’État.
Cette recherche est l’occasion d’exposer des controverses aux thèmes d’actualité :
- La vaccination antivariolique fera l’objet, en 1760, d’échanges sur l’intérêt de son extension
entre Bernouilli et d’Alembert rédacteur de la « parte mathématique » de l’Encyclopédie. En
juin 1774, les inoculations faites à Louis XVI et à ses frères sont saluées comme un triomphe
des Lumières contre la maladie qui avait terrassé Louis XV un mois avant.
- Fallait-il privilégier une hospitalisation inadaptée et à réformer ou préférer la « domiciliation »,
le maintien à domicile étant prôné par Dupont de Nemours dès 1786 ?
- La Révolution envisage la régénération du corps social et un homme nouveau. Deux grands
médecins originaires l’un du Tarn, Philippe Pinel, l’autre de Toulouse, Jean-Etienne Esquirol,
appliqueront ces principes à Paris pour traiter les maladies mentales.
Pinel en 1800, participera aux côtés de Guillotin à la première campagne nationale de
vaccination antivariolique voulue par Bonaparte, relayée par les préfets, les maires, le clergé.
- Dans les années 1820-1840 marquée par l’hygiénisme, Villermé pointe dans ses enquêtes
de terrain la causalité sociale et perçoit le lien entre sanitaire et social.
Ce ne sont que quelques aspects de l’étude très dense d’Albert Anouilh. Il ne manque pas de
rappeler, entre autres, le contexte politique et constitutionnel, l’influence des philosophes et
plus tard des philanthropes, le rôle de nombreux médecins pour certains méconnus.
Les sources qu’il a utilisées sont conséquentes : pour cette seule première partie, il a consulté
une soixantaine d’ouvrages et a travaillé le plus souvent sur les publications originelles. Aussi,
j’ai illustré le texte par certaines de leur reproduction.
Je remercie Albert Anouilh, personne qualifiée du Comité régional d’histoire, d’avoir réalisé
une étude historique aussi fouillée qu’il va présenter à la prochaine réunion de nos instances.
Michel Lages,
Président du Comité régional d’histoire
de la Sécurité sociale de Midi-Pyrénées