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de la philanthropie et la rigueur de la science, L’observation religieuse des lois fait seule
la réconciliation du cœur et de la raison. l’homme de bien (art.5). « Celui qui viole ouver-
C’étaient les deux voies permettant d’atteindre tement les lois se déclare en état de guerre avec
au bonheur commun. « L’un des principaux de- la société » (art.6).
voirs des hommes est de concourir au bien de
leurs semblables, d’étendre leur bonheur de Les philosophes des temps révolutionnaires, les
diminuer leurs maux ». Idéologues, méditent un régime médicinal, une
La Philanthropie, amour des hommes, apparaît constitution thérapeutique, qui ouvre une ère de
comme une laïcisation de la charité dont le guérison collective et de santé. On doit au comte
terme est suspect d’appartenir aux sentiments et Destutt de Tracy (1754-1836) le néologisme
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aux pratiques de l’Ancien Régime. Elle est une d’idéologie qui embrasse la philosophie au
composante de la sociabilité, le critère de temps du Directoire et du Consulat. Le terme de
l’homme de bien, la condition du bonheur com- gnoséologie conviendrait mieux : l’idéologie,
mun, un analogue de la vertu, un synonyme de science des idées, est un examen de la faculté
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la « sympathie » et des sentiments moraux de penser, d’organiser et d’exprimer les idées.
théorisés par Adam Smith , que P J G Cabanis « Mon objet, écrit le citoyen Destutt-Tracy aux
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(1757-1808) tentait de fonder scientifiquement. élèves de l’École centrale, est de vous faire con-
naître ce qui se passe en vous quand vous pen-
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Cabanis revendique explicitement une ambition sez, parlez, écrivez . » L’idéologie se réfère au
hippocratique que l’on retrouve dans le Traité sujet, la grammaire générale au moyen, la lo-
médico-philosophique de Pinel : « Transporter gique au but. Penser, c’est sentir. Métaphysique
la médecine dans la philosophie et la philoso- et psychologie sont récusées, chimériques. Nihil
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phie dans la médecine ». Cabanis se proposait est in intellectu quod non prius fuerit in sensu.
d’étudier, entre la claire raison et les fonctions
organiques, l’instinct et les passions qui sont la La voie de la sensation permet de remonter à la
cause des mouvements de la vie sociale et poli- source cachée de l’acte connaissant. Découvrir
tique ; de pénétrer « jusque dans leurs éléments cette source, c’est maîtriser l’éducation, fonder
les plus déliés, le mécanisme des procédés de la législation, former le citoyen, ce proche des-
l’intelligence, celui des passions, et toutes les cendant de la statue animée de Condillac. Les
circonstances particulières qui peuvent altérer Idéologues exploitent l’héritage de Descartes,
ou modifier leur mouvement. » Kant, Condillac, Hobbes, Locke, Helvétius.
Développer l’action de la raison, maîtriser les Cabanis se plaît à nommer les Idéologues, ses
passions, c’était façonner ce citoyen idéal qui confrères à l’Institut, mathématiciens, profes-
semble habiter jusque dans ses recoins la seurs dans la jeune école normale : Garat,
Constitution de l’an III (22 août 1795) dans sa Monge, Laplace, Volney, Condorcet, Haüy,
partie Devoirs en invoquant la règle d’or : « Ne lorsqu’il s’agit d’appliquer le calcul des probabi-
faites pas à autrui ce que vous ne voudriez pas lités aux sentiments moraux, cependant que
qu’on vous fît. Faites constamment aux autres le Degérando, Laromiguière, Lancelin, Maine de
bien que vous voudriez en recevoir » (art.2). Biran assument la synthèse philosophique.

29 Le mot de philanthropie a deux sens : 1) un sens générique de bienveillance etc. ; 2) un sens spécialisé d’action sociale
et d’institution de bienfaisance privée, se substituant aux secours publics auxquels l’épistémé libérale était peu encline ; cf.
Catherine DUPRAT, Usage et pratiques de la Philanthropie. Pauvreté, action sociale et lien social, à Paris, au
cours du premier XIXe siècle, 2 volumes. Paris, Comité d’histoire de la Sécurité sociale, 1996.
30 « La sympathie que la philosophie écossaise considère comme le principe de toutes les relations morales. » CABANIS,
Introduction, p XX, op.cit. Infra note 32
31 Adam SMITH, The theorie of moral sentiments (Théorie des sentiments moraux), 1759. Smith récapitule la pensée
des Lumières écossaises (Hutcheson, Hume, Dugald Stewart, Reid, Ferguson, …) qui a influencé l’Idéologie et
spécialement Cabanis. Leur théorie du sens commun, fortement anti-cartésienne, est adoptée par les Doctrinaires de la
Restauration, en particulier Royer-Collard. V. Cousin a consacré un cours aux Lumières écossaises. Chez A Smith, le
sentiment moral guide la conscience morale de chacun et n’abolit pas le réalisme des intérêts. « Ce n’est pas la bienveillance
du boucher, du brasseur ou du boulanger que nous attendons notre dîner, mais de leur égard à leur propre intérêt. » Les
intérêts se combinent, comme chez Bentham. Hobbes, Hume, Smith, Bentham ont séjourné en France et contribué aux
Lumières françaises. Sur A Smith et l’antinomie apparente de la bienveillance et de l’intérêt, cf. : Gérard JORLAND, Le
problème Adam Smith, Annales ESC, 1984.
32 Pierre-Jean-Georges CABANIS, Rapports du physique et du moral de l’homme, seconde édition, 2 tomes, Paris,
Crapart, Caille et Ravier, an XIII, 1805., t 1, p 20. Cette édition regroupe six mémoires dont trois ont été lus devant les
membres de l’Institut national à partir de sa création en 1795.
33 Au sens de religio, scrupule.
34 DESTUTT DE TRACY, Mémoire sur la faculté de penser, 1798.
35 DESTUTT DE TRACY, Projets d’éléments d’idéologie à l’usage des écoles centrales de la République française,
Paris, Didot, an IX, p31.

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