Page 7 - lettre_crhssoccitanie_35m
P. 7

Poujade et son mouvement ne sont pas dégon-       Finances,  pour  violation  de  la  loi  du  18  août
                   16
              flés. »                                           1936. Gérard Nicoud sera alors condamné à six
                                                                mois de prison ferme en appel pour avoir violé
                                                                        17
              La  création  des  unions  parallèles  à  l’UDCA,  à   cette loi.
              partir de mars 1955, vise à rassembler derrière
              Pierre Poujade l’ensemble des classes sociales.   Le 11 avril 1969, à la suite d’une attaque menée
              Les  deux  seules  unions  parallèles  qui  ont   contre  les  locaux  de  l’Inspection  des  contribu-
              quelque  influence  sont  l’UDAF  (Union  de  dé-  tions directes de La Tour-du-Pin deux jours plus
              fense des agriculteurs de France parfois appelée   tôt,  Gérard  Nicoud  est  arrêté.  Son  inculpation
              Union  de  défense  des  paysans  de  France)  et   provoque une manifestation violente, réunissant
              l’UDOF (Union de défense des ouvriers français    près de 2 000 contestataires à Bourgoin-Jallieu
              parfois  appelée  Union  de  défense  des  travail-  qui affrontent les forces de l’ordre. Bilan : 40 po-
              leurs de France).                                 liciers  et  10  manifestants  blessés.  Cet  événe-
                                                                ment, suivi  par  la  libération  de  Gérard Nicoud,
              5. Et ensuite le CIDUNATI                         rend le CID et son leader célèbres dans le pays.

              Un autre mouvement voit le jour : le Comité d’in-
              formation et de défense (CID), plus connu à la
              suite de sa fusion sous le nom de CID-UNATI,
              est  un syndicat  indépendant  de  tendance  néo-
              poujadiste né en plein bouleversement des an-
              nées 1968 à La Bâtie-Montgascon, tout près de
              La Tour-du-Pin en décembre 1968. Une réunion
              s’y  tient  alors  et  ses  participants  rédigent  une
              pétition  contre  l’application  de  la  loi  sur  l’assu-
              rance maladie-maternité obligatoire pour les non-
              salariés  non agricoles (adoptée  en  juillet 1966)
              qui doit être appliquée en 1969.
                                                                L’attaque du 9 avril 1969 de La-Tout-Du-Pin, deux tonnes de feuilles
                                                                  d’impôts jetées par les fenêtres ou entassées dans des sacs à patate.
                                                                            (Source : Le Dauphiné Libéré)

                                                                Très médiatisé, le CID se rapproche d’un autre
                                                                syndicat  de  travailleurs  indépendants,  l’UNATI
                                                                (Union nationale des travailleurs indépendants),
                                                                dont les méthodes sont similaires au « mouve-
                                                                ment de La Tour-du-Pin ».
                                                                La  fusion  va  s’opérer  en  avril 1970  et  donner
                                                                naissance  au  CID-UNATI  (Confédération  inter-
              Réunion du CIDUNATI en Île de France, présidée par Gérard Nicoud   syndicale  de  défense  et  d’union  nationale  des
              Gérard Nicoud (né en 1947), qui n’a alors que 21   travailleurs indépendants).
              ans, se fait remarquer et prend rapidement la tête
              de ce « mouvement de La Tour-du-Pin ». S’éten-    Ce  mouvement  se  pose  comme  le  protecteur
              dant  rapidement  dans  le  pays,  il  parvient  dès   « des franges dominées de l’artisanat et des in-
              février 1969 à réunir 9 600 signatures pour la pé-  dépendants marginalisés par le petit patronat »
              tition. Si son mouvement commence à connaître     qui  réagissent à  ce  qu’elles  perçoivent  comme
              du succès, il ne parvient pas pour autant à faire   une précarisation de ses conditions matérielles
                                                                          18
              fléchir le gouvernement. Constatant son échec,    d’existence . Il considère que la concurrence de
              Gérard Nicoud change de ton : « pour faire recu-  plus en plus importante de la « grande distribu-
              ler la « redoutable machine qu’est l’État », il est   tion »  est  déloyale  et  dangereuse.  De  fait,  elle
              nécessaire de « descendre dans la rue ». Sous     génère un sentiment de déclassement, une peur
              les applaudissements, il constate, en évoquant    profonde de disparaître en tant que petits com-
              Mai 68, que « le gouvernement ne comprend que     merçants et artisans. Cette crainte provoque un
              le coup de poing sur la table ». Il prône la « grève   fort  ressentiment  à  l’égard  de  l’État  –  perçu
              de l’impôt » et le retrait des caisses publiques en   comme  un  complice  des  grandes  enseignes  –
              mars 1970. Cette prise de position lui vaut une   qui  s’exprime  à  travers  le non-consentement  à
              plainte de Valéry Giscard d’Estaing, ministre des   l’impôt, jugé injuste et spoliateur.


              16  AN, F1CIII/1347, rapport du préfet de la Gironde au ministre de l’Intérieur du 8 août 1955.
              17  Le Progrès, 26 mars 1970.
              18  DELALANDE (N.), SPIRE (A.), « Histoire sociale de l’impôt », La Découverte, Paris, 2010, p. 77-78.


                                                            7
   2   3   4   5   6   7   8   9   10   11   12