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de position explicite en faveur de la reconnais- c) Une révolution conceptuelle : le rapport Paul
sance d’un droit à ne pas être handicapé », BLANC
c’est-à-dire une action eugéniste.
Le rapport d’information présenté par le séna-
b) Un renversement anthropologique d’origine teur Paul BLANC, au nom de la commission des
légale affaires sociales du Sénat, relatif à la politique
de compensation du handicap (24 juillet 2002)
Le premier trimestre 2002 est un temps d’effer- introduit plusieurs notions extérieures au
vescence législative. Une batterie de lois orga- champ conceptuel de l’assurance maladie et du
nise, dans une sorte de profusion désordonnée, droit social :
le démantèlement de l’arrêt PERRUCHE et la 1) « le parcours de vie » ;
mise en place des instruments de reconnais- 2) « le remplacement de l’évaluation adminis-
sance et d’accueil du handicap. trative des « déficiences » par une analyse per-
sonnalisée des potentiels et des besoins des
La loi n° 2002-2 du 2 janvier 2002 rénovant personnes handicapées » ;
l’action sociale et médico-sociale, est fonda- 3) « la création d’une allocation compensatrice
trice par son ampleur (87 articles), ses réfé- individualisée » ;
rences aux Droits de l’Homme et du Citoyen 4) « la création de sites pour la vie autonome ».
que complètent de nouveaux droits civils, axés Ces notions mettent en défaut le répertoire lexi-
sur la liberté, l’autonomie, la participation à la cal, cognitif et juridique de l’assurance maladie
vie de la cité et sa portée organisatrice ; elle et ses pratiques médico-légales. Toute une an-
réforme le champ institutionnel mis en place par thropologie latente se trouve soudainement
les lois du 30 juin 1975. déclassée. L’embarras est palpable lors de l’au-
Elle constitue l’assise de la loi du 11 février dition du Directeur général de la CNAM-TS et
2005 pour l'égalité des droits et des de la responsable de la mission handicap (27
chances, la participation et la citoyenneté mars 2002), sur la question de la compensation.
des personnes handicapées. Loi de cohésion La compensation, pour les représentants de
sociale, elle inclut dans le même champ d’appli- l’assurance maladie, ne se distingue pas de la
cation personnes âgées, handicapés, person- réparation et des dispositifs existants qu’il s’agi-
nes vulnérables en état de pauvreté ou de pré- rait de mieux coordonner.
carité et réaffirme leur droit aux prestations en
espèces et en nature désormais portables et d) Une promesse de citoyenneté : le discours
non quérables. Les acteurs de la solidarité na- du Président de la République (3 décembre
tionale sont l’Etat, les collectivités territoriales, 2002)
les organismes de sécurité sociale, toutes les
institutions et établissements médicaux-légaux. Devant le conseil national consultatif des per-
sonnes handicapées, le Président Jacques
La loi n° 2002-76 du 17 janvier 2002 de CHIRAC promet d’ouvrir aux personnes handi-
modernisation sociale contient une véritable capées les portes de la Cité et la voie de la
charte des droits fondamentaux de la personne citoyenneté. Il déclare le handicap cause natio-
handicapée et définit un droit-créance d’un type nale
nouveau, le droit à compensation.
e) L’affirmation d’un sujet de droit : le rapport de
La loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative au Denis PIVETEAU (Propositions pour les
droit des malades et à la qualité du système missions et la structure d’une “Agence nationale
de soins. des handicaps”, juillet 2003)
L’article 1 de la loi décline trois principes :
er
1) dans une formule brève et ciselée dont la La conception d’une future agence du handicap
généralité dépasse le code de l’action sociale et selon Denis PIVETEAU, Directeur de la gestion
des familles, la loi coupe à la racine le principe des risques à la CNAM-TS et lui-même père
de l’arrêt PERRUCHE et sa prospérité jurispru- d’un enfant polyhandicapé, rompt avec le dispo-
dentielle en édictant : « Nul ne peut se prévaloir sitif classique de la Sécurité sociale et ses
d’un préjudice du seul fait de sa naissance » ; pratiques médico-légales. Denis PIVETEAU fait
2) le second principe admet une responsabilité émerger, de la personne handicapée, un sujet
médicale pour faute caractérisée ; de droit ignoré de la Sécurité sociale. On a pu
3) le troisième principe affirme en matière de observer que le « droit de la protection sociale
prise en charge du handicap le jeu de la fait peu de place au sujet de droit » et que « la
solidarité nationale mise en œuvre au moyen personne protégée n’a pas la maîtrise du dispo-
d’un instrument spécifique : la compensation sitif protecteur dont elle n’est que la bénéfi-
qui « relève de la solidarité nationale ». ciaire ». La réparation de l’accident du travail
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