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conformation  cérébrale  capable  d’assimiler  les   par  elle-même  d’essence  criminelle.  Seuls  im-
              règles sociales reçues  de  son milieu. L’habitus   portent le moment de la réponse et l’urgence de
              de socialité procède d’un dépôt cérébral « dû aux   la mise hors d’état de nuire. Le juge qui agit  a
              acquisitions ancestrales ».                       posteriori,  dans  le  respect  des  formes,  est  en
              La  dégénérescence  s’apprécie  par  écart  à     retard  sur  le  médecin  homme  de  terrain,  aux
              l’homme  « normal » ;  le  dégénéré  est  « une   avant-postes de la prévention ; leurs fonctions en
              déviation du type normal d’humanité ». Le con-    la matière se confondent : lorsqu’il s’agit de folie
              cept  de  déviance  qui  connote  une  perversion   criminelle, la frontière est indiscernable entre le
              morale, opère la transition avec celui de crimina-  judiciaire  et  le  médico-légal.  Les  notions  de
              lité :  « Le  dégénéré  devient  souvent  un  délin-  prison et d’asile sont interchangeables, comme
              quant. » Contre le péril social de la dégénéres-  les notions de dégénéré et de criminel.
              cence,  la  société  a  le  droit  et  le  devoir  de  se
              défendre. Elle prospère dans les milieux dégra-   L’aliénisme,  agent  conservateur  de  la  société,
              dés par la misère, l’alcoolisme, l’insalubrité, et se   construisait le socle de la criminologie auquel ont
              reconnaît  au  comportement :  indiscipline,  vio-  contribué Moreau de Tours, clinicien des excen-
              lence, résistance à l’autorité, « conflit permanent   triques et d’Edgar Poe, Brouardel, ténor des con-
              avec  l’autorité  et  par  suite  avec  les  usages   grès de criminologie, Charles Féré qui publie en
              reçus ». Mais, à côté des dégénérés inférieurs,   1888  Dégénérescence  et  criminalité,  Brierre
              inaptes à la vie sociale et à la lutte pour la vie,   de Boismont qui réclame des lieux spéciaux de
              incapables d’autonomie et dépendants, il est des   détention pour les Communards, ces fous-crimi-
              dégénérés  supérieurs,  dotés  d’une  intelligence   nels, Lasègue et Falret qui traitent de la folie con-
              brillante, singuliers originaux, dont Jean-Jacques   tagieuse, Alexandre Lacassagne qui médite sur
              Rousseau représente le type accompli. Le choix    la  peine  de  mort  et  la  guillotine.  Travaux  d’un
              de Rousseau comme pervers-type représentatif      temps.
              incrimine  lourdement  le  Contrat  social,  ses
              adeptes,  les  principes,  les  fondements  idéolo-  La  théorie  de  l’hérédité  de  Prosper  Lucas  sur
              giques  de  la  Révolution  française.  Les  « mau-  laquelle avaient prospéré tant de théories expli-
              vaises idées » sont aussi pernicieuses, sous une   catives  que  hantait  l’arbitraire,  conservait  sa
              autre forme, que l’alcoolisme qui est la marque   valeur  scientifique,  inspirant,  parallèlement  à
              princeps  de  la  dégénérescence.  La  conformité   Darwin et à l’école anglaise de psychologie, un
              sociale à l’ordre établi est une preuve irréfragable   pionnier : Théodule Ribot (1839-1916) dont Taine
              de santé mentale.                                 et Renan ont soutenu la promotion académique.
              La  réponse  de  défense  sociale  proposée  par   Ribot  est  « le  premier  en  France  et  dans  le
              Magnan  et  Legrain  est  simple  et  pratique :  la   monde auquel ait été confiée une chaire de psy-
              séquestration.  La  dégénérescence  absorbe  la   chologie », à la Sorbonne (1885), au Collège de
              notion de responsabilité pénale parce qu’elle est   France (1888) .
                                                                             98































              98  Parmi les rares études consacrées à Théodule Ribot, on note l’importante contribution de Serge Nicolas : « L’hérédité

              psychologique d’après Théodule Ribot (1873) : la première thèse française de psychologie scientifique  », in
              L’Année psychologique, 1999, 99-2, p. 295-348. Voir aussi : Serge Nicolas et David J Murray, « Théodule Ribot (1839-
              1916) », in Psychologie et Histoire, 2000, vol. 1, p. 1-42.


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