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Il avait rencontré Marie à Lyon en 1875, employée   A. Le citoyen dans la cité 27
            dans un grand hôtel après avoir été ouvrière dans
            l’industrie textile. Elle était née dans une famille de   Alors que son titre d’ingénieur des Ponts pouvait lui
            paysans pauvres du Jura. Illettrée, Georges Sorel lui   ouvrir les portes de la meilleure  société, Georges
            fit donner, selon son biographe Pierre Andreu, « une   Sorel, «  rebelle  » (E.  Frenay), s’installe dans un
            instruction étendue » qui « développa ses grandes   quartier mal famé, peuplé par des chiffonniers, des
            qualités naturelles ». De leur rencontre Sorel « data   cordonniers,  des ramoneurs, une rempailleuse  de
            son éveil à la vie, et même à la vie de l’esprit ». Si   chaises, au n° 13 de l’impasse des amandiers, dans
            elle n’a pas converti Georges Sorel au socialisme   une maison où logent des maçons et un portefaix.
            (elle  était  parfaitement  indifférente  à  la  politique),   Proche d’une maison close. Il vit en union libre avec
            son dévouement aux pauvres « a sûrement achevé     Marie  Euphrasie  David.  Plus  tard  le  couple  s’ins-
            de le convertir à l’amour des humbles et des dés-  talle au premier étage d’une maison bourgeoise, au
            hérités à travers la charité d’un christianisme agis-  21 rue des mulets (devenue rue Auguste Blanqui),
            sant » et comblera de ses dons les Petites sœurs   face  à  l’église  de  La  Réal,  fréquentée  par  Marie
            des pauvres de Perpignan . « C’est ainsi que notre   David, «  sur une placette ensoleillée  occupée  par
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            vie intellectuelle dépend en grande partie du hasard   une fontaine où viennent boire les vaches des lai-
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            d’une rencontre. » 26                              tiers du quartier ».
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            En 1889, Sorel prend ses fonctions à Perpignan,    amitié sincère et fidèle le lie aux frères Jean et Henri
            avec le titre d’ingénieur  chargé  du «  service ordi-  Bertran de Balanda ; au chanoine Torreilles, profes-
            naire » de l’arrondissement de Perpignan, auxquels   seur au Grand Séminaire. Il admire l’ascétisme
            sont rattachés le service du port de Port-Vendres, le   et  la sainteté de l’archiprêtre  de la cathédrale de
            contrôle des travaux de la ligne ferroviaire Prades-  Perpignan, l’abbé Metge, qui loge dans un taudis en
            Perpignan et le contrôle d’exploitation des Chemins   ruine.
            de fer du Midi.




            25. P. Andreu, op. cit., p. 41.
            26. G. Sorel : « Jean-Jacques Rousseau », art. cit.
            27. Nous utilisons l’article d’Étienne Frenay, « Georges Sorel à Perpignan (1879-1892) », Bulletin de la Société agricole, scientifique
            et littéraire des Pyrénées-Orientales, CVIII, 2001, pp. 246-271, aimablement communiqué par la Médiathèque de Perpignan.
            28. Étienne Frenay, art. cit., p. 250.

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