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Les  mots  d’ordre  du  Philanthrope  Degérando   autres ? ».  Une  épistémologie  du  social  com-
               sont  politiques :  conservation,  amélioration,   mande la politique, l’économie et la médecine.
               « les deux buts qui doivent être poursuivis à la   D’ailleurs la politique consiste à bien lire les lois
               fois par toutes les institutions sociales » . Il y a   de l’économie expression du destin ou de la Pro-
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               homologie entre l’homme civilisé et ses rapports   vidence  des  sociétés  libérales,  auxquelles  il
               avec les sauvages, et le Philanthrope avec les   convient  d’adapter  l’individu.  La  philanthropie
               pauvres : ils ont mission d’assimiler, d’améliorer,   prend une part active à l’organisation du monde
               de relever de conserver. « L’harmonie générale   et à la reconstruction de l’individu.
               de  la  société  »  repose  sur  deux  obligations :
               pour le riche, « un patronage éclairé et bienveil-  Pour  l’Économie  politique,  « il  y  a  dans  les
               lant envers le pauvre », pour le pauvre « le tra-  sociétés une nature des choses qui ne dépend
               vail,  l’ordre  et  la  conduite ».  La  morale  établit   en rien de la nature de l’homme et que nous ne
               entre le riche et le pauvre « des relations utiles   saurions régler arbitrairement » (Dictionnaire de
               pour tous les deux  ». L’état de besoin s’avère   l’économie politique, 1852) .
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               un stimulant, un procédé utile dont le visiteur du
               pauvre sait user. L’assistance doit être accordée
               sous condition de contrepartie : travail ou rem-
               boursement du secours. L’industrie génère-t-elle
               la misère ? « L’homme est à la fois le but pour
               lequel  l’industrie  opère,  en  cherchant  à
               contenter, même à exciter ses besoins ; et l’ins-
               trument que l’industrie emploie pour produire. »

               Le  Philanthrope  des  années  1830  est  libéral,
               optimiste  et  utilitariste :  il  croit,  à  la  suite  de
               Bentham, au bonheur général qui résulte du pro-
               grès. La misère sociale n’est qu’un accident de
               l’industrialisation, un mauvais moment à passer,
               qui sera guérie par les mêmes causes qui l’ont
               produite. Les secours doivent être conditionnels,
               conjoncturels,  contractuels :  « L’assistance  ne
               doit  être  accordée  que  sous  condition ;  qui  la
               demande, qui  l’accepte se soumet d’avance à
               cette loi : cette condition sera parfois le travail,
               quelquefois la restitution du secours concédé à
               titre  d’avance ;  toujours  son  fidèle  emploi  et
               l’observance  du  régime  déterminé  dans  les
               établissements publics. » Tel est le dogme de la
               bienfaisance publique pour J.-M. Degérando et
               ses disciples.

               Plus  près  de  nous,  réactualisant  ce  débat  an-
               cien, la contrepartie et le spectre de l’assistanat   Le tome second du Dictionnaire de l’économie politique
               ont été les enjeux qui ont entouré la transforma-           (« Source gallica.bnf.fr /BnF »)
               tion du RMI en RSA. Le régime de la contrepar-
               tie, disciplinaire, voire correctionnaire,  poursuit
               un but social édifiant, moral et pédagogique : la   Le  Philanthrope,  l’Économiste,  l’Hygiéniste
               réintégration  de  ceux  qui  s’en  étaient  écartés   partagent la même croyance en cette loi fonda-
               dans la grande famille humaine, le retour à une   mentale.  « L’inégalité  dans  les  conditions
               vie sociale normale. « Si le bonheur général, si   sociales est dans la nature même de la société,
               le  perfectionnement  de  la  grande  famille  hu-  comme  l’état  social  est  une  loi  de  la  nature
               maine forme le but de toutes les sciences so-    humaine : elle est dans la nature de la société
               ciales, celle qui s’occupe de toutes les sciences   parce qu’elle est la condition de ses progrès ; or
               sociales  n’est-elle  pas  le  but  de  toutes  les   le  progrès  est  la  grande  loi  de  la  société


               58  DEGÉRANDO, De la bienfaisance publique, Paris, Renouard et Cie, 1839, II, p. 541.
               59  DEGÉRANDO, ibidem, I, Introduction, p LXXIII.
               60  Dictionnaire de l’Économie politique contenant l’exposition des principes de la science, sous la dir. de MM
               COQUELIN et GUILLAUMIN, Paris, Guillemin et Cie, 1853, Vol. 2, J-Z, art. Nature des choses, p. 262 : «  L’économie
               politique n`est point, comme on l'a dit et cru quelquefois, une collection de principes et de maximes arbitraires ; c’est une science fondée sur
               l’observation des lois permanentes de la nature même des choses, suivant la méthode d’expérience ou d’induction qui guide les investigations
               humaines dans les sciences physiques ».


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